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27/03/2025
Des “Omnibus” sur les voies de la simplification
En réponse aux recommandations du rapport Draghi visant à restaurer la compétitivité des entreprises, la Commission européenne a proposé le 26 février dernier un paquet législatif de trois textes destinés à simplifier ou alléger les obligations relatives à la durabilité (Corporate Sustainaibility Reporting Directive-CSRD), à la diligence raisonnable en matière de durabilité (Corporate Sustainability Reporting Due Diligence Directive-CSRDDD) et au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (Carbon Border Adjustment Mechanism-CBAM). Le titre d’Omnibus de chacun de ces textes tient au fait que leurs adoptions éventuelles viendraient modifier plusieurs dispositions actuelles de différents règlements. En quelque sorte, un train de mesures marquant des arrêts sur chacun des règlements à amender.
Les dispositions de la directive portant sur le reporting de durabilité des entreprises (CSRD) avaient été critiquées à deux titres, la lourdeur administrative des obligations de collecte des données et de leur publication, d’une part, et la mise à nu des entreprises européennes dans un espace concurrentiel international, d’autre part. C’est pourquoi la directive Omnibus portant sur la CSRD réduirait de 70% les obligations de collecte de données, et surtout restreindrait le champ d’application aux entreprises de plus de 1000 salariés, et qui ont un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros ou un bilan supérieur à 25 millions d’euros, alors qu’actuellement y sont soumises les entreprises de plus de 250 salariés, faisant un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros ou ayant un bilan supérieur à 25 millions d’euros. La Commission estime que 80% des entreprises concernées échapperaient ainsi à l’application de la directive en vigueur.
Pour ce qui concerne la directive sur la diligence raisonnable en matière de durabilité (CSRDDD), le champ d’application serait restreint à celui de la CSRD et les obligations de vérification de durabilité seraient limitées aux partenaires directs avec un allègement des fréquences de contrôle portées à 5 ans.
Par ailleurs les propositions de la Commission réduiraient de facto les obligations de reporting au titre de la “Taxonomy” en simplifiant l’application du critère DSNH (Do no significant harm-Absence de préjudice important) qui impose de ne causer aucun préjudice aux objectifs environnementaux de la durabilité (atténuation du changement climatique, adaptation au changement climatique, utilisation durable des ressources marines, économie circulaire, prévention et/ou réduction de la pollution, protection et/ou restauration de la biodiversité et des écosystèmes). Cela conduirait notamment les banques à ne plus prendre en compte dans l’évaluation de leur ratio d’actifs verts les entreprises qui ne seraient plus dans le champ de la CSRD.
Enfin s’agissant de la mise en œuvre du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, la Commission propose d’exempter des obligations de la réglementation les entités qui importent moins de 50 tonnes des produits concernés (engrais azotés, acier, ciment, aluminium, hydrogène). La Commission évalue à 182 000 le nombre des entreprises qui seraient ainsi exemptées, soit 90% des importateurs, qui ne représentent que 1% des importations soumises au mécanisme.
Le paquet législatif des Omnibus est désormais en discussion au Parlement Européen, où selon les orientions politiques on approuve ou critique l’approche de la Commission qui s’écarte de la déclinaison de l’engagement “Fit for 55”. A droite de l’hémicycle, on réclame un examen accéléré des propositions de la Commission, en souhaitant même aller plus loin en matière de simplification, tandis qu’à gauche on craint que cette dérégulation remette en cause les orientations environnementales et de lutte contre le changement climatique de l’Union européenne. Dans le contexte des nouvelles tensions géopolitiques auxquelles l’Union doit faire face, en modifiant ses priorités stratégiques, il est fort probable que les initiatives de simplification annoncées en janvier dernier par la communication “Une boussole pour la compétitivité” vont filer bon train.